L'éveil de la conscience collective
Depuis quelques années, lhumanité est en train de vivre léquivalent dune énorme poussée de fièvre. Et aussi contradictoires que soient les interprétations de ce phénomène, tout le monde sent à présent que quelque chose de décisif est en train de se dérouler en ce début de troisième millénaire.
Sur quoi ces événements vont-ils déboucher ? Le but de cet article nest pas de donner une réponse définitive à cette question je crois de toute façon que cest une erreur de penser que le futur est écrit à lavance - mais de proposer une série de réflexions sur les caractéristiques les plus frappantes dans ce processus.
Le Monde se polarise
A loccasion de la réélection de George W. Bush, la plupart des analystes politiques ont insisté sur le fait quil existait désormais un profond clivage à lintérieur des Etats-Unis, la population américaine semblant sêtre littéralement coupée en deux. Dun côté : les représentants du système, les riches, les conservateurs, les puritains, les fondamentalistes religieux, bref toute lAmérique bien-pensante qui adhère totalement au discours sécuritaire quon lui sert en permanence. De lautre : certaines minorités, les laissés-pour-compte, les habitants des grandes villes cosmopolites, les pauvres, et de façon générale tous les gens qui ne sont plus dupes des mensonges du gouvernement.
Toutefois, si les Etats-Unis sont au premier chef concernés par ce processus de division, les événements qui secouent notre planète forcent à présent chacun à prendre parti : il sagit dun phénomène de polarisation global, et dautant plus profond quil ne porte pas uniquement sur le domaine politique, mais sur la façon même de se situer dans la réalité. Le contexte dincertitude et deffondrement rapide des idéologies qui caractérise notre époque, en effet, ne laisse guère doptions : soit accepter le changement, ce qui suppose de se dessaisir de ses préjugés et daccepter une réalité plus fluide, où il faut se passer de la présence rassurante de lautorité externe pour trouver les réponses en soi ; soit refuser tout changement, en se cramponnant à ses positions, à son système de pensée et à sa foi aveugle dans lautorité.
Or, si la première de ces deux voies est naturellement empruntée par un nombre croissant de gens désireux daller au bout dun certain chemin intérieur, la seconde est pour sa part la destination naturelle de tous les esprits que lon pourrait qualifier de « dépendants vis-à-vis du système ».
Cette façon de voir les choses peut paraître simpliste, mais je crois quelle rend assez bien compte de ce qui est en train de se produire dans lesprit dun certain nombre de dirigeants.
Ainsi, lorsque Patrick Le Lay, président de TF1, a expliqué que son métier consistait à vendre du temps de cerveau disponible pour que les gens achètent du Coca-Cola, sa déclaration a fait des gorges chaudes en France pendant des semaines. Bien sûr, ce mélange dingénuité et de cynisme imbécile offre un légitime objet de moquerie, mais ce qui ma surtout frappé dans cette anecdote est le sentiment de sécurité intellectuelle que cet homme devait ressentir pour sexprimer ainsi. De la même façon, ce qui retient mon attention lorsque Silvio Berlusconi déclare que lOccident doit désormais « défendre la supériorité de son système dans le cadre dune nouvelle guerre des civilisations » ou que George W. Bush annonce quil a besoin dencore plus de fonds pour envoyer des bombardiers tuer des civils au nom de la sécurité des Etats-Unis est beaucoup moins le caractère injustifiable de leur discours que le fait quils lassènent avec une telle confiance.
Il me semble que ces hommes ont à tel point intériorisé une certaine vision limitative de la réalité quils ont fini par perdre toute distance critique. Ils se comportent comme si leur système de valeurs était devenu universel, ce qui les incite à parler ouvertement, sans se rendre compte les réactions que cela peut provoquer auprès de gens qui ne le partagent pas. Piégés par le sentiment quils ont de dominer totalement la situation, davoir toutes les réponses, ils offrent ainsi à lhomme ordinaire un spectacle des plus instructifs.
Le pouvoir, en effet, cherche à simplifier les affects au maximum pour rendre les masses manipulables. Mais cette stratégie fonctionne de moins en moins, parce que la conscience politique de lhumanité saffine. Cest une conséquence de la contradiction constante entre les paroles et les actes de ces stratèges, qui défendent des idéaux de plus en plus humanistes, mais qui enclenchent des guerres économiques et politiques de plus en plus monstrueuses, forçant ainsi lhumanité dans son ensemble à approfondir sa représentation de la réalité.
Cest en cela que jaffirme que tout en étant une catastrophe ambulante, George W. Bush est le président le plus pédagogique que lon puisse rêver. Compte tenu du contexte mondial actuel, rien ne serait plus dangereux quun manipulateur génial et charismatique. Par la stupidité même de la tyrannie que lui et son équipe cherchent à imposer au monde, le symbole quil incarne finit par devenir un authentique catalyseur de la conscience mondiale.
Cela me semble être une nouveauté remarquable en ce début de millénaire. Car si presque toutes les guerres et conflits majeurs qui ont ponctué lhistoire du vingtième siècle peuvent être analysés comme des constructions politiques, le fait est que plus les choses avancent, et plus ce caractère artificiel devient ostensible. Ce phénomène est devenu très net au moment de la seconde Guerre du Golfe, où les calculs du gouvernement américain sont ressortis avec une telle évidence aux yeux de lhumanité dans son ensemble que cela a suscité les plus puissantes manifestations de pacifisme jamais vues dans lhistoire, au point de perturber totalement le plan mis en place par les Américains pour la prise de contrôle de cette région du globe.
Plus récemment, lUkraine donne un autre exemple de réaction populaire inattendue, avec les protestations suscitées par les fraudes qui ont entaché lélection présidentielle du 21 novembre. Là encore, les calculs du pouvoir en place étaient clairs : ils consistaient à miser sur lapathie des masses pour manipuler le scrutin. Et là encore, il se sont révélés faux, une résistance inattendue ayant poussé des millions dUkrainiens à aller manifester dans la rue, et à camper des journées entières dans un froid glacial jusquà obtenir la mise en place de nouvelles élections.
Cet aspect me semble particulièrement important, parce quil permet de se détacher dune conception pessimiste de lhistoire. Il y a plusieurs façons, en effet, de déduire la violence et linhumain dans un modèle politique : la première est de la rapporter uniquement au peuple, en montrant que lhumanité ordinaire est un animal stupide et dangereux, qui a besoin dêtre contrôlé et dirigé pour son propre bien par une élite responsable. La seconde est de partager les torts, en montrant que la violence est le produit global de la crainte réciproque entre le peuple et ses dirigeants. La troisième, tout en ne niant pas lexistence de cette dialectique, consiste à la rapporter en priorité au pouvoir, en montrant comment il tend à attirer les esprits qui sont le plus incapables de lassumer correctement.
Or, si les autorités actuelles consacrent la presque totalité de leur énergie à mettre en place des procédés de dissimulation, cest quelles sont parfaitement conscientes que la vérité dévoilerait leur immense responsabilité dans la propagation de la violence à laquelle elles prétendent vouloir mettre fin. La plupart des conflits majeurs qui ont marqué ces dernières décennies ont été provoqués par un nombre limité dindividus sans scrupules, qui nont réussi à mener leur projet à terme que parce que le système politique, économique, intellectuel et médiatique qui aurait du les stopper les a en réalité servis.
Tant que lon pensera la violence comme le produit global de la « nature humaine », on restera dans une anthropologie fermée, où les formes de linhumain peuvent varier, mais où le mal est appelé à se répéter indéfiniment. Si, en revanche, on peut montrer que cette même violence découle de conditions contingentes, alors on ouvre la possibilité de sortir du cycle infernal de lhistoire telle que nous lavons connue jusquici.
Par conséquent, en montrant que le pouvoir, en dernière analyse, ne fait que refléter les attentes profondes de lhumanité, on démontre du même coup quune paix réelle et durable nest pas une simple chimère, mais quelle peut parfaitement se réaliserà condition dêtre canalisé de façon correcte. Les bonnes volontés sadditionnant, le renoncement sur lequel le mal fait fond peut alors laisser place à une libération progressive des esprits, et à une pacification du champ social dans son ensemble. Mais, là encore, on voit quune telle option ne peut se réaliser quà partir dune révolution intérieure des consciences, et pas dune unique réforme des structures de pouvoir.
Je crois pour ma part que cette révolution silencieuse est déjà en train de saccomplir. A lheure actuelle, en effet, le pouvoir sous toutes ses formes est en train de faire de la sécurité son thème de campagne majeur. Il en vient à prendre des mesures de plus en plus drastiques et complexes pour assurer lavenir. Or, parallèlement à cela, lhumanité dans son ensemble rejette de plus nettement toute tentative de contrôle, sécartant ainsi progressivement du schéma sur lequel le pouvoir base toutes ses projections. Là encore, la polarisation ne cesse de saccentuer, et il est probable que bientôt, on verra de plus en plus se détacher deux discours totalement antithétiques, lun basé sur la peur et le soupçon, lautre sur la confiance et le sens de la solidarité.
Plus un système est aliénant, plus il a besoin de se représenter son extériorité sous un jour négatif, afin de justifier la violence quil entretient dans ses murs. Cest sur la base de cette dialectique de la terreur que les deux blocs ont pu maintenir leur mainmise tout au long de la Guerre Froide.
Toutefois, lorsque le Mur de Berlin sest effondré, sest posée la question de savoir ce qui allait se passer dans un monde où il ny avait plus dEnnemi. La réponse est sous nos yeux : faute de double maléfique pour justifier son existence, le pouvoir américain sest inventé des adversaires, pour finalement se comporter comme un enfant trop gâté qui se met à casser ses jouets.
Depuis lapparition de lEtat-nation, en effet, il y a eu une sorte descalade constante des concepts politiques censés assurer toute impunité aux autorités. Dabord, au nom de lintérêt supérieur de la nation, cela a été la « raison dEtat ». Puis, au nom du bon droit humanitaire, le « principe dingérence ». Additionnant les deux dans une seule équation, le gouvernement américain actuel en a tiré le concept de « guerre préventive », monstre hybride et conclusion logique de cette tentative de légitimer la violence du pouvoir. Le seul problème, cest que de plus en plus de gens perçoivent qui tire véritablement les ficelles de lépouvantail terroriste.
En ce sens, le fait que la réalité politique tende à virer à ce point à la caricature est significatif. Ce que démontrent les événements mondiaux actuels, cest tout simplement quil ny a pas de station intermédiaire : soit notre comportement est basé sur la peur, soit il est basé sur la confiance, et désormais, nous sommes tous invités à choisir entre les deux.
On comprendra quen ce sens, tous les événements apparemment négatifs qui sont en train de se dérouler un peu partout sur la planète ont un effet positif, qui est de forcer lhumanité à sunifier et à gagner en conscience. Notre être interne, en effet, souffre dun déséquilibre quil ne supporte plus, et pour rétablir léquilibre, il utilise le mal comme un catalyseur. Il faut simplement espérer que les Américains sauront comprendre à temps que leur politique de la «sécurité à tout prix » est en train damener le monde au bord du gouffre.
Je reste toutefois optimiste sur la question, car il me semble que nombre de facteurs jouent désormais en faveur de léveil collectif.
Dans les années 70, alors que les scientifiques posaient les bases de la topologie du cerveau et quil courait toutes sortes de théories sur le rapport entre lhémisphère droit et lhémisphère gauche, et un certain nombre de chercheurs marginaux avaient émis lhypothèse quil arriverait un jour où lhumanité franchirait un seuil critique, qui se traduirait par la création dune forme de conscience globale. Or, il me semble que cest précisément ce qui est arrivé avec Internet, la naissance de ce réseau de communication planétaire sétant doublé dun réseau plus subtil à percevoir, mais pas moins important, entérinant ainsi la notion de noosphère développée par Teilhard de Chardin.
De ce point de vue, je crois que toute la dialectique du rapport de force qui a caractérisé les relations entre les différents hémisphères géographiques na jamais été quune manifestation symbolique de conflits entre les différents aspects de notre être psychique, et que tout ce qui est en train de se passer actuellement est corrélatif dun rééquilibrage de nos deux hémisphère cérébraux, qui au lieu dêtre en conflit, se remettent progressivement à dialoguer ensemble.
Il est cependant logique que ce processus rencontre des résistances importantes, et pour lessentiel, je lis les crises violentes que nous traversons actuellement comme le produit des tentatives de préserver à tout prix un schéma de fonctionnement mental rigide et basé sur le contrôle.
A partir de là, il me semble que les options restent fondamentalement ouvertes, et que la réélection de George W. Bush ne signifie par forcément un retour en arrière. Il ny a pas si longtemps, 70% des Américains le soutenaient, et il ny en a plus aujourdhui que la moitié, et ce uniquement parce quils croient encore quil y a eu des armes de destruction massive en Irak et que Saddam Hussein était responsable des attentats du 11 septembre. Certes, une bonne partie de la population américaine vit encore dans la peur et lignorance, mais même si le système médiatique et économique fait tout pour la maintenir en place, il y a un nombre croissant dindividus qui ne sont plus dupes. Cette prise de conscience globale est comme une marée : lente, mais irrésistible.
Je crois dailleurs que lune des raison pour lesquelles la crise ukrainienne suscite un tel intérêt de la part du public mondial est quelle intervient comme une sorte de réponse par rapport à ce qui sest passé aux Etats-Unis en 2000 et en 2004. George W. Bush, en effet, a été élu deux fois de suite en trichant lors des élections, et le peuple américain, bon gré mal gré, a accepté cet état de fait. Cependant, là où les Américains ont cédé, les Ukrainiens se sont révoltés et ont manifesté jusquà obtenir une révision des élections, témoignant ainsi dun sens de la dignité et dun degré de conscience supérieur à celui de la « première démocratie du monde ». Je trouve particulièrement intéressant que la conscience collective ait choisi de se manifester précisément là où on lattendait le moins, dans une région du globe réputée pour sa léthargie politique, ce qui revient à donner une intéressante leçon de choses aux démocraties occidentales. Ce renversement dialectique suggère une forme dintelligence particulièrement fine, dont les manifestations vont encore aller en saffinant. Nous ne sommes certainement pas au bout de nos surprises dans ce domaine !
Je ne nie pas, de ce point de vue, quil existe des forces historiques et économiques objectives, mais je nie en revanche quil y ait une logique déterminée de lhistoire. Avant tout, ce sont nos pensées qui déterminent ce que sera la réalité, et quand la nature de ces pensées change, la réalité change aussi.
En ce sens, la division même entre sphère individuelle et sphère politique qui est à la base de la culture politique moderne me semble être un symptôme daliénation. En faisant de la politique un domaine ontologique à part, sous la domination des universels, le pouvoir arrive à ancrer en nous une représentation du monde où le seul plan de réforme possible passe par ses propres structures. Perdant de vue le fait que le Monde tel quil va nest quun reflet de nous-mêmes, nous en arrivons alors à croire que la seule façon dagir « concrètement » passe forcément par une réforme structurelle. Faute de pouvoir tomber sous le coup dun appareil de mesure qui pourrait entériner son existence, lintériorité de lâme est dès lors négligée au profit dinterminables actions politiques, dont linutilité va la plupart du temps de pair avec le caractère spectaculaire. La conscience se retrouve ainsi paralysée dans une représentation dichotomique, où elle est demblée partagée entre un espace privé et individuel - qui est fondamentalement celui de limpuissance et un espace politique et universel, qui est celui de lefficacité - mais dune efficacité qui fait cercle.
Or, en réalité, il nexiste aucune opposition entre le domaine politique et le domaine privé. Tout étant interdépendant, chacune de nos pensées peut prétendre « changer le monde ». En tant quindividus, nous avons tous le pouvoir immanent dinfluer sur léquilibre global. Ce dernier étant déterminé par notre intériorité, tout ce qui ne la prend pas pleinement en compte se situe automatiquement dans lillusion. Cest ce qui permet de dire que non seulement la prétention du politique à se constituer dans un champ duniversalité autonome ayant les clés du réel est mensongère, mais quelle est encore criminelle, puisquelle ne fait jamais que dévaluer la valeur de la réforme individuelle interne, et implanter en lhomme un sentiment foncier dinutilité.
Il suffit pourtant de regarder où cette « urgence de la praxis » à amené la cité pour comprendre que, dans la quasi totalité des cas, elle a simplement servi de stratégie de détournement, aggravant dramatiquement les maux quelle était venue résoudre. Pour un homme de pouvoir, en effet, changer la réalité passe par des schémas économiques, des réformes juridiques, des mouvements révolutionnaires et de grands plans densemble destinés à « créer une société nouvelle ». Mais il y a une autre façon de concevoir le rapport de lhomme au monde, qui consiste à voir comment chacune de nos pensée altère la réalité qui nous entoure, et à travailler constamment sur cette révolution intérieure.
Ainsi, même si le lâcher-prise nest pas fait pour produire des effets politiques visibles à court terme, cest pourtant le seul principe qui puisse prétendre amener une paix véritable et durable. Toute pensée non centrée sur le présent, en effet, en vient facilement à accumuler les injustices et les violences au nom de la grande révolution humaine qui, demain, viendra effacer la liste interminable des crimes qui ont été commis en son nom. Les dirigeants peuvent être tellement obsédés par lavènement du paradis à venir quil ne se rendent pas compte que pour le réaliser, ils ont transformé le monde en un enfer. Parce quils se tiennent en plein dans son centre, ils ne perçoivent plus que cest là le Cercle qui est au cur même de lhistoire.
En vérité, il est beaucoup plus simple de se jeter à corps perdu dans la bataille pour changer le monde que de faire leffort de se changer soi-même. Cela demande une attention, une énergie et surtout un courage incomparablement plus grands. Nous sommes si vifs à compenser nos blessures intimes par lengagement mondain quon peut facilement lire toute lhistoire humaine comme le simple reflet manifeste des conflits que nous entretenons en nous. Réussir à affronter ses propres peurs et sen dessaisir est la forme la plus haute de courage : cela demande une sincérité totale, et le renoncement à tous les faux-fuyants.
Il devient clair, dès lors, que la bataille décisive se joue à ce niveau-là ; lorsque lâme, cessant de reproduire les fractures de son intériorité dans le monde externe, commence enfin à ramener son regard en direction delle-même, elle entame le seul processus de guérison authentique. Se libérant du filet dapparences que le Monde génère autour delle, elle accède progressivement à la paix réelle, qui na plus besoin de « contraire » dialectique pour se maintenir en place. Pour quiconque se tient dans cette compréhension, il devient tout de suite évident que les luttes politiques sont, dans leur essence, totalement vaines, et que, bien que se réclamant sans cesse de lhomme, elles ne cessent de loublier inlassablement.
La fatalité historique, en ce sens, me semble beaucoup moins une caractéristique coextensive du réel que la simple conséquence du fait que, par manque dexpérience, nous ne réussissons pas à rassembler la volonté suffisante pour assumer notre capacité à recréer la réalité. Les crises que nous traversons actuellement sont les signes vivants de nos pensées, de nos craintes, de nos espoirs collectifs : lhistoire est un reflet des luttes qui prennent place dans lhumanité intérieure.
Voilà pourquoi notre époque, en dépit de ses incertitudes, est tellement intéressante. Nous sommes en train de vivre un de ces moments privilégiés où les anciens systèmes interprétatifs sont en train de dissoudre, et où la réalité dans sa totalité répond par un phénomène de dilatation, qui laisse entrevoir de nouvelles possibilités. Espérons que nous saurons en tirer parti sans céder à la peur de notre propre liberté.